dimanche 3 avril 2011

La révolution Tunisienne se cherche encore

Qu’est ce que la souveraineté de l’état. Ce terme tant employé ces «  dernières semaines par le premier ministre tunisien, pour ne citer que lui, qui provoque l’enthousiasme de certains, et le désespoir d’autres. Qu’elle la valeur de la volonté du peuple dans ce concept. Et suffit-il à lui tout seul pour expliquer l’échec du 3éme sit in de la kasbah.
Tant de questions que je vais essayer d’aborder  le plus objectivement possible, en tenant en compte les avis des uns et des autres, et en me basant sur les nombreuses discussions que j’ai eu dans les cafés de Tunis, les taxis,  avec les commerçants, mais aussi avec quelques militants et quelques « bloggeurs ».
Nul ne peut contester que la souveraineté de l’état exige la supériorité des ses institutions, et « l’intouchabilité ». Ceci exige avant tout la soumission du peuple aux institutions ; or « la révolution »  a ramené dans l’imaginaire du peuple l’illusion de la légitimité révolutionnaire, et populaire.  Et c’est là que les avis divergent ; là ou certains ne comprennent pas les images des policiers frappant à coups de matraques les manifestant qui essayent d’imposer à nouveau le sit in de la Kasbah 3, et ne l’acceptent pas. D’autre ressentent le besoin de se sentir à nouveau en sécurité, et ressentent le besoin de vivre sous la souveraineté de l’état ; ils trouvent en conséquence que les policiers qui « corrigent » les fouteurs de troubles légitime et compréhensive. Ce qui est frappant c’est que, hormis les salafistes qui prônent le Kalifa, tout le monde appelle l’état état, et tout le monde est d’accord sur la nécessité d’une gouvernance.
La révolution tunisienne n’a pas bousculé les institutions de l’état, et n’a pas bouleversé l’ordre préétablie. C’est pour cette raison que je ne trouve aucune justification à l’appeler proprement dit révolution. Et de ce fait je nie l’existence de légitimité révolutionnaire. C’est dans ce sens que ni ceux qui prétendent être fils de la révolution ne reconnaissent le conseil supérieur pour la protection de la révolution, ni ceux qui n’y ont pas participé ne reconnaissent les soit disant acquis de la révolution ; parce que concrètement, ce soulèvement populaire n’a fait que libérer la parole et la pensée, sans se concrétiser sur le terrain par des faits tangibles et perceptibles. Ceci  explique largement le rejet des uns et des autre, et explique aussi l’existence encore de l’ancien régime, des anciennes institutions, et  donc des anciennes pratiques, de l’ancien discours, et des anciennes doctrines.
Le soulèvement populaire qu’a connu la Tunisie le mois de janvier est une conséquence d’un ras le bol des injustices sociales, du manque d’épanouissement des droits et des libertés, des inégalités, de la corruption, et de la répression. C’était un désaveu du système de gouvernance  en Tunisie, un rejet du système étatique. La chronologie de ce soulèvement n’a pas pu permettre à ce soulèvement de s’assurer la continuité jusqu’à l’éradication du système d’état. La peur  de l’insécurité, la peur de l’avenir, la peur de voir l’économie s’effondrer, a conforté le laisser en place des reliquats de l’ancien système, en modifiant l’apparence, sans se pencher sur le fond. Nous avons alors assisté à trois mouvement « politique et intellectuels » : un pas en arrière des politiques en place, changement de leurs attitudes et de leur discours, dans l’optique de se maintenir sur la scène politiques  en invoquant comme le fit Ben Ali la compréhension des aspirations populaires; un pas en avant  de certaines personnalités, partis politiques, bloggeurs, journalistes, syndicats  afin de gagner une marge d’action et une place dans le paysage médiatique et politique  en essayant de s’approprier la légitimité révolutionnaire; et du surplace pour la plupart du peuple qui ne se reconnaissent ni dans les premiers ni dans les seconds dont certains commencent à se sentir piégés entre les deux.
Et la volonté du peuple ?
Qui des deux premiers manœuvrants peut affirmer qu’il la représente ?  Et puis y a-t-il vraiment une seule volonté du peuple ? N’y a-t-il pas des volontés différentes et des besoins différents selon l’emplacement, les occupations, les acquis, les besoins, les craintes mais aussi l’éducation, les convictions et les situations économiques de chacun ?
S’il est simple de parler de la volonté du peuple de Sidibouzid ou du peuple de Kasserine, il est difficile de parler de la volonté du peuple du Grand Tunis. Dans les deux premiers exemples, les populations ont fait le combat ensemble, ont parlé ensemble, ont pensé ensemble et ont milité ensemble ; ceci s’est vu lors des 2 premiers sit in à la kasbah ; n’importe quelle personne qui est venue de Sidibouzid ou de Kasserine était capable de porter par sa voix la volonté de sa région. L’homogénéité des ces région a fait naitre une seule volonté.
En revanche dans les grandes villes, les disparités entre les quartiers, pauvres et riches, populaires ou chics, fait que les voix se dispersent. L’absence de vécu collective et commun, l’absence de dialogue, de communication ont fait naître une adversité plus qu’une simple diversité. C’est là le nœud du problème. Le Grand Tunis continue et continuera à peser lourd dans la construction de notre avenir tunisien. Et ce n’est pas un simple sit in à la kasbah qui permettra un brassage des idées car beaucoup des habitants des quartiers marginalisés comme Fouchana, Borjlouzir, Etadhamen, Erraoudha pour ne citer qu’eux ne seront pas sensibilisés. Mais aussi beaucoup des quartiers riches et chics aussi comme Ennasser, Carthage, Sokra ne le seront pas.
J’ai entendu des appels à la révolution 2, à un nouveau 14 janvier, avec les mêmes terminologies, de DEGAGE à khobez we mèè (pain et eau)…Or comment faire une deuxième révolution si la première n’est pas accomplie ?
Il est important à mon sens de donner suite au soulèvement populaire et accomplir la révolution tunisienne. Cette révolution n’est pas nécessairement violente, et ne nécessite pas des armes, elle dit être une révolution des idées, des mentalités, des volontés, une révolution qui fera naître enfin la volonté de tout les tunisiens.
J’appelle tout ceux qui ont participé à la Kasbah 1 puis à la Kasbah 2 et tout ceux qui essayent de monter la Kasbah 3 d’oublier la Kasbah comme centre d’inertie des demandes et des revendications et de se tourner vers le peuple, de monter une tente dans chaque quartier, et de faire de ces tentes des lieux de brassage d’idées, des forums, de maturation idéologique et politiques afin de concrétiser la volonté du peuple mais surtout afin de mobiliser le peuple pour que le jour j, ce n’est plus une seule manifestations que verra l’état, mais des centaines de manifestations à la fois leurs rappelant la puissance du peuple, et sa souveraineté.
Avec un simple calcul, si on pose une tente pour chaque 50 000 citoyen il faudra 200 tente pour couvrir tout les tunisiens. Si de chaque tente on en tire un représentant nous aurons enfin un conseil représentatif avec 200 membres qui auront la légitimité populaire sans avoir besoin de recourir au suffrage universel.


                                                                              par   Ben Hadj Amine

4 commentaires:

  1. commençant par "la souveraineté de l'état", le "Shwing gum" préféré de Sebssi. Ce terme qu'il dit et redit à chaque passage télévisé, chaque interview et apparemment dans ses rêves est devenu la cible de la révolution, c'est comme si nos frères se sont martyrisés pour ça. Moi je dirais que ce terme n'existe pas et s'il y est c'est parce qu'il est typiquement arabe pour ne pas dire tunisien, on l'a inventé pour que le peuple craint le gouvernement comme si c'était Dieu, ce terme épouvantail qu'on ne cesse de nous souler avec. On a oublié peut être que le gouvernement est élu par le peuple pour servir et non pas pour SE servir. Pourquoi on n'aborde pas un tel problème dans d'autres états, pourquoi Sarkozy reçoit un gâteau plein le visage en plein publique et on n'en fait pas une polémique? Pourquoi un ministre Suédoise qui achète avec la somme de 60 Euros des Toblerone avec la carte bancaire du ministère, on la poursuit judiciairement pour abus de pouvoir? n'est-ce pas la souveraineté de l'état? n'est-ce pas le 3ème pays le moins corrompu au monde? Bref, tout ça est un faux problème et une nouvelle tentative pour la déviation de vision.

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  2. la souveraineté de l'état n'est pas un terme arabe, il trouve son origine dans l'apparition de l'état nation historiquement avec la montée des idéologies communistes et socialistes.
    pur le reste je suis d'accord avec toi, surtout sur la supposé légitimité populaire de toute souveraineté. l'état doit servir et ne pas se servir..mais tant qu'on délègue sans arrêt à une élite les clef du royaume, il ne se feront pas prier pour voler et violer.

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  3. cette confusion de l'appellation de ce qui s'est passé en Tunisie est tout à fait normale, cette soi disant "révolution" n'existe dans aucun livre de stratégie ou de guerre, elle n'a pas manqué d'originalité, beaucoup d'improvisation, plein de gaffes, des dommages, un manque d'encadrement, des surprises... il fallait qu'à chaque situation et à chaque moment trouver une nouvelle solution adaptée, préparer des plans B C D E..., émettre des hypothèses... mais il y a des choses standards pour lesquelles qu'on l'a appelée révolution qui est toujours en marche et il est encore tôt pour dire qu'elle a réussit ou non. Dans ce cadre je ne peut dire que: "Entre une pratique sans tête et une théorie sans jambes, il n'y aura jamais à choisir." Citation de Régis Debray

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  4. je n'ai pas dit qu'elle n'a pas réussi, j'ai dit qu'elle est toujours inachevée, et que ce qui s'est passé en janvier ne dépasse pas le soulèvement populaire

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